La gauche durant la nuit, l’extrême droite durant la journée : Reporters sans frontières étrille CNews et son manque de pluralité (26/11/2025)
Reporters sans frontières a analysé 700 000 bandeaux des principales chaînes françaises d’information en continu, durant le mois de mars 2025. Selon leur enquête, publiée mercredi 26 novembre, la chaîne d'extrême droite CNews continue de contourner ses obligations en termes de pluralité.
CNews ne respecte pas le pluralisme dans les temps de parole. La proportion de la chaîne d’extrême droite, vitrine politique du groupe Bolloré, à tordre les règles inscrites dans sa convention est connue. Les enquêtes se sont multipliées, comme les alertes auprès du gendarme de l’audiovisuel français, l’Arcom.
L’organisation non gouvernementale (ONG) Reporters sans frontières (RSF) vient d’apporter une nouvelle preuve au dossier déjà bien rempli de CNews. Dans une enquête rendue publique mercredi 26 novembre, RSF annonce avoir passé au crible les antennes des quatre chaînes françaises d’information en continu (BFMTV, CNews, Franceinfo, LCI) du 1er au 31 mars 2025.
« CNews triche »
L’ONG spécialisée dans la défense de la liberté de la presse a pu, grâce à l’aide du journaliste indépendant Antoine Schirer, développer un outil automatique de capture d’écran – toutes les dix secondes – qui aurait permis d’analyser 700 000 bandeaux. « CNews, loin de respecter le pluralisme à l’antenne comme elle s’en targue, triche », est donc en mesure de confirmer RSF. L’ONG a, en conséquence, prévu de saisir l’Arcom.
CNews a mis en place, ces dernières années, un système de « rattrapages nocturnes » pour donner « l’illusion du pluralisme politique » et « rendre une copie propre à l’Arcom », rappelle RSF. Et ce sans même parler de son habitude à camoufler les prises de paroles des Éric Zemmour, Philippe de Villiers et consorts derrière l’étiquette de chroniqueur, malgré leurs ambitions électorales.
Le principe est simple : « La gauche arrive largement en tête pendant que les Français dorment et l’extrême droite occupe, et de loin, la première position aux heures de forte audience. » Soit la multiplication des « tunnels » de conférences ou discours de responsables insoumis ou socialistes au milieu de la nuit pour rééquilibrer les temps de parole.
RSF chiffre, dans le cadre de son enquête, ce « grand écart vertigineux » : aux heures de grande écoute, de 7 à 10 heures et de 18 à 21 heures, l’extrême droite (notamment le Rassemblement national et Philippe de Villiers) cumule 40,6 % d’exposition contre 15,4 % pour la gauche – la France insoumise (LFI), le Parti communiste français (PCF), le Parti socialiste (PS), Europe Écologie-Les Verts (EELV). Durant la nuit, de minuit à 7 heures, le rapport s’inverse avec 60,1 % d’exposition pour la gauche contre 1,6 % pour l’extrême droite.
« Deux fois plus que l’ensemble de ses trois concurrentes réunies »
« Au cours du mois étudié, aucune autre chaîne n’a opéré une telle différence de traitement », pointe Reporters sans frontières. RSF s’est aussi penchée sur les thématiques traitées par les chaînes, et relève qu’au mois de mars, CNews a couvert plus d’une centaine de faits de violence ; « deux fois plus que l’ensemble de ses trois concurrentes réunies ».
Quant à la condamnation de Marine Le Pen dans l’affaire des assistants de parlementaires européens, le 31 mars, l’analyse de RSF montre que sur CNews, 147 minutes de temps de parole ont été consacrées à la critique de la décision de justice, contre… 11 minutes pour la défendre.
Une enquête qui tombe à un moment où la droite et l’extrême droite prennent d’assaut l’audiovisuel public (France Télévisions, Radio France), accusé de partialité en faveur des idées de gauche. La frange droite de l’Hémicycle a même obtenu l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur « la neutralité, le fonctionnement et le financement de l’audiovisuel public », lancée mardi 25 novembre.
La saisine de l’Arcom par RSF pourrait, elle, suivre le même chemin qu’une précédente ayant poussé le Conseil d’État à sommer l’Arcom, en février 2024, de renforcer ses contrôles. Le gendarme de l’audiovisuel avait dû revoir son fonctionnement et ne plus se limiter le décompte des temps de parole aux personnalités politiques, mais aussi à l’ensemble des participants aux programmes diffusés, y compris les chroniqueurs.
17:33 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cnews, mainpulation, télévision |
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