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10/02/2020

La fake news de Madame Salamé sur France Inter

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Ce qui est terrible quand on profère un mensonge en direct à la radio, c’est qu’il révèle aussi votre méthode de travail : cliquer sur le premier lien Google et lire la première phrase. Bernard Marx rétablit les faits.

Ce lundi 10 février sur France Inter, Monsieur Demorand et Madame Salamé interviewaient Gabriel Zucman, économiste spécialiste des inégalités et de la fiscalité, professeur à l’université de Berkeley aux États-Unis. Il publie en France, avec son collègue Emmanuel Saez, le livre Le Triomphe de l’injustice [1] après une parution en anglais aux États-Unis où il a fait évènement. Gabriel Zucman et Emmanuel Saez figurent en effet parmi les conseillers des équipes de Bernie Sanders et d’Elizabeth Warren en matière de réforme fiscale et notamment d’imposition de la fortune.

J’étais tout à ma joie de ne pas avoir à écouter un des ministres qui ont leur rond de serviette au Grand Entretien de France Inter, ou à tourner le bouton pour ne pas avoir à écouter leurs sempiternelles rengaines. Je me disais que ce serait sûrement pour demain, mais qu’à chaque jour suffit sa peine, profitons du moment présent. Cela rajeunissait beaucoup d’entendre quelqu’un se référer à un dirigeant politique qui avait dit et fait : « Au-dessus de tant, je prends tout ! » Même s’il s’agissait des États-Unis et pas de la France.

C’est alors que j’ai entendu Léa Salamé apostropher l’économiste avec l’assurance de quelqu’un qui sait naturellement de quoi elle parle : « Comment on explique le taux de pauvreté inférieur aux États-Unis qu’il l’est en France. Ça, c’est clair. Et qui continue à baisser ces cinq dernières années, malgré les politiques Trump. » « Heu ! Alors là, je suis loin d’être sûr que le taux de pauvreté soit inférieur aux États-Unis qu’en France », lui a répondu poliment l’ignorant chercheur. Mais la journaliste a tenu à conclure : « Je veux juste préciser, parce que j’ai retrouvé sur ce que j’ai dit sur le taux de pauvreté, le taux de pauvreté c’est 13,1% aux États-Unis et 14,8% en France ».

Effectivement, quand on tape sur Google « taux de pauvreté aux États-Unis », apparaît en première ligne la phrase : « La pauvreté aux États-Unis concerne officiellement 43,1 millions de personnes, soit 13,5% de la population américaine en 2015 ». Et si l’on tape « taux de pauvreté France », la première phrase qui s’affiche est : « Selon l’Institut national des études économiques, 14,7 % de la population vivaient sous le seuil de pauvreté en 2018 ».

Sauf qu’il faut quand même faire l’effort de lire les deuxièmes phrases. Si elle les avait lues, la journaliste politique de référence sur les ondes du service public n’aurait pas pu dire que le taux de pauvreté aux États-Unis est inférieur à celui de la France. Ou alors elle aurait diffusé sciemment une fausse nouvelle. À chacun son opinion sur ce point.

Au-delà du premier résultat Google

Le fait est que la deuxième phrase pour la recherche « taux de pauvreté États-Unis » est : « Selon plusieurs universitaires, le taux officiel de pauvreté ne donnerait pas une appréciation juste de la réalité, plus préoccupante ». Cependant que pour « taux de pauvreté France », la deuxième phrase est : « (60 % du niveau de vie médian : près de 1065€ mensuels, après impôts) : soit 9,3 millions de personnes. En 2017, 8,9 millions vivaient sous ce seuil. »

En clair, le taux de pauvreté officiel aux États-Unis n’est pas calculé de la même manière qu’en France. Il est évalué là-bas sur la base d’un montant absolu de revenus, alors qu’en France il est évalué sur la base d’un pourcentage du revenu médian. 50 ou 60%. En France, effectivement en 2018, 14,7% de la population dispose de revenus inférieurs à 60% du revenu médian. Ce taux tend à augmenter puisqu’il était de 14% en 2014. Merci Monsieur Macron.

Gabriel Zucman a raison de dire que les trois mesures principales de sa politique fiscale – la transformation de l’ISF en IFI, la baisse du taux d’imposition sur les sociétés et la flat taxe sur les revenus du capital – permettent de la caractériser comme une politique en faveur des très riches. Et l’OFCE a raison d’affirmer que cette politique appauvrit les pauvres.

Si l‘on prend comme référence la limite de 50% du revenu médian et non plus 60% le taux de pauvreté est en France proche de 8% quasiment constant depuis 2013. Et évidemment, si l’on veut comparer les taux de pauvreté aux États-Unis et en France, il faut les calculer de la même manière. Il n’y a pas à chercher très loin. Il suffit de taper « taux de pauvreté par pays ». Le premier lien qui s’affiche est celui de l’OCDE. On tombe sur une page qui donne le taux de pauvreté calculé avec un seuil de 50% du revenu médian. Pour la ligne France cela donne 8,3% (en 2016) et pour la ligne États-Unis 17,8% (en 2017).

Le graphique est éloquent. La France figure encore – avant l’impact de la réforme macronienne du chômage et celle de la retraite – parmi les pays où le taux de pauvreté est le plus bas et les USA est le pays riche où le taux de pauvreté est le plus élevé. Si l’on prend le seuil de 60% du revenu médian, le taux de pauvreté aux USA est de près d’un quart (24,2%), soit 10 points de plus qu’en France selon l’Observatoire des Inégalités.

Madame Salamé va-t-elle corriger et s’excuser ou s’enfoncer dans le journalisme de fake news de classe ? Réponse demain.

 

Bernard Marx, Regard

Notes

[1Emmanuel Saez, Gabriel Zucman : Le triomphe de l’injustice - Richesse, évasion fiscale et démocratie. Seuil, février 2020

23/06/2019

Charline Vanhoenacker : Je suis toujours hallucinée qu'on déroule le tapis rouge à l'extrême droite

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Avec ses acolytes Alex Vizorek et Guillaume Meurice, Charline Vanhoenacker ironise tous les jours sur l'actualité. Avant de partir en vacances jusqu'au retour de « Par Jupiter ! » à la rentrée prochaine du lundi au vendredi de 17 heures à 18 heures, la journaliste et humoriste belge de France Inter, âgée de 41 ans, revient sur les moments les plus inspirants d'une année intense.

Avez-vous été approchée par Laurent Ruquier pour remplacer Christine Angot et Charles Consigny dans « On n'est pas couché » ?

CHARLINE VANHOENACKER. Non ! Jouer les procureurs, non merci… À chaque fin de saison, Guillaume Meurice et moi sommes sollicités. Sauf si une chaîne a un concept génial, on ne veut pas faire de télé. Vous allez me prendre pour un ostrogoth mais je préfère la radio. À France Inter, on a une liberté totale. L'aurait-on ailleurs ? Pas sûr…

Depuis 10 ans, vous vivez en France. Êtes-vous toujours surprise par les médias hexagonaux ?

Je suis toujours hallucinée qu'on déroule le tapis rouge à l'extrême droite. En Wallonie, elle n'est jamais sur les plateaux et, aux européennes, elle a fait moins de 5 %. En France, Marine Le Pen est partout et a gagné le scrutin… Les médias sont responsables de la banalisation de ses idées. Surtout ceux comme Sud Radio dont les théories d'Alain Soral sont le fonds de commerce.

Alex Vizorek est triste de l'arrêt de l'émission de Thierry Ardisson dont il était l'un des chroniqueurs ?

Il faut lui demander. Moi, je suis ravie que ça s'arrête car c'était très putassier. Il n'y a pas une semaine où on ne s'est pas moqué de lui. « Les Terriens » comme « On n'est pas couché » n'existeraient pas en Belgique.

Pourquoi ça ?

Parce qu'on se fiche de l'avis de Yann Moix sur l'album de Kendji Girac, non ? Laurent Ruquier est très symptomatique de la télé à la française. Chez nous, les politiques ne vont pas dans les émissions de divertissement car leur personnalité importe moins que leurs idées.

Pourtant c'est intéressant de confronter l'avis des artistes sur la société avec celui des politiques. Hélas, ces confrontations sont surtout utilisées pour le buzz et l'invective que pour alimenter le débat.

Comme Laurent Ruquier, avez-vous « l'impression de vivre sous la dictature des réseaux sociaux et de Marlène Schiappa » ?

Pas du tout. On est épargné des polémiques car, comme nous, notre public a grandi avec Charlie Hebdo, Siné ou les « Guignols », et sait qu'on est dans la satire et jamais dans la diffamation.

Vous n'avez jamais été convoqués au CSA ?

Non. Deux membres du CSA ont demandé à nous rencontrer pour savoir comment on faisait justement pour ne jamais franchir la ligne jaune. Je leur ai dit que cette rencontre ressemblait au fameux sketch des « Guignols » intitulé « Encule un mouton » où Alain de Greef, mythique directeur des programmes de Canal +, doit expliquer au CSA ce qu'est l'humour. Mais ils n'avaient jamais entendu parler du sketch. J'ai dû leur raconter… Je ne faisais pas la maline. C'était une vraie mise en abyme.

Vous qui connaissez bien la Maison de la Radio, y a-t-il une photo de Nicolas Hulot dans le bureau de Nicolas Demorand et de Léa Salamé ?

Non car ils ont vite arrêté de parler de cette démission surprise en direct à cause de la vidéo où ils la décrivaient comme « un moment de grâce ». Ils reconnaissent eux-mêmes avoir fait une connerie. Mais, nous, on était contents, ça nous a fait trois mois de blagues !

Y a-t-il une couronne dans le bureau de votre patronne Laurence Bloch depuis que France Inter devance RTL en audience ?

Non, elle ne se la pète pas du tout. Honnêtement, on est nombreux à être gênés d'être la première radio de France. Être premier, c'est le début des emmerdes. La preuve ! Mais c'est épatant que le service public soit en tête avec des moyens inférieurs aux autres. Quand Europe 1 débauche quelqu'un de chez nous, ils offrent un salaire délirant…

Y a-t-il une photo de Raphaël Glucksmann, compagnon de Léa Salamé et tête de liste PS aux Européennes, dans votre bureau ?

On a accroché un portrait du ministre de la Culture, Franck Riester, de peur d'oublier son visage. Mais le couple Léa Salamé-Raphaël Glucksmann nous a bien fait marrer. On s'en serait moqué de toute façon, mais évidemment on l'a fait d'autant plus que Léa est de la maison. Mais elle l'a bien pris, elle a un côté déglingo. Je m'en prends régulièrement à son invité le matin et elle ne m'a jamais rien dit.

Et une photo de Sibyle Veil, la patronne de Radio France, dans le bureau des syndicats de la Maison Ronde ?

Non la décoration est très minimaliste. Il y a des mégaphones et des banderoles. Je suis en colère car je ne comprends pas pourquoi, alors qu'on a d'excellents résultats, on coupe les budgets ? (NDLR : Radio France était en grève mardi pour protester contre le plan d'économies prévoyant près de 300 suppressions de postes) A quoi ça sert d'être premier, si on veut te saborder ?

On a élargi la publicité sur nos antennes. On a ouvert un restaurant et loué les locaux pour des défilés de mode. On va devoir faire quoi de plus ? Ouvrir un centre commercial ? Il y a des gens qui travaillent 7 jours sur 7, 24 heures sur 24. Les heures supplémentaires ne sont pas payées. On ne vole pas nos congés. C'est tellement injuste.

18/05/2015

Quand France Inter défend les retraites chapeau

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Une radio de service public doit-elle tenter de convaincre ses auditeurs que les retraites chapeau des patrons licencieurs sont justifiées et bonnes pour l’économie du pays ?

Ce fut le pari douteux de France Inter le jeudi 14 mai de 19H20 à 20H

Que reste-t-il de la mission de service public quand une radio comme France Inter- dont une partie du personnel vient de conduire une longue grève pour avoir les moyens de travailler-  vend à ses auditeurs une  séance du « Téléphone sonne »  qui passe quarante minutes à justifier la « retraite chapeau » de Philippe Varin  ex patron du groupe PSA Peugeot-Citroën?  Je ne pense pas avoir été le seul auditeur à me poser cette question quand, circulant sur une autoroute, j’ai  écouté de bout en bout, l’émission animée par Pierre Weill le jeudi 14 mai à partir de 19H20.
 
L’animateur avait trois invités qui étaient Laurence Parisot, ex patronne du MEDEF ; un patron d’une société de conseil pour fixer les salaires de patrons,   un professeur d’économie.  Autant dire qu’ils avaient été triés sur le volet  pour orienter l’émission en faveur des intérêts de Philippe Varin, ce qui fut le cas en dépit de quelques questions d’auditeurs eux aussi bien filtrés m’a-t-il semblé.
 
On rappellera ici que l’homme qui a fermé l’usine d’Aulnay-sous-Bois   avait dit qu’il renonçait  à sa « retraite chapeau» en 2013 devant le tollé de protestation qui suivit l’annonce d’un cadeau de départ de 21 millions d’euros, comme récompense d’un sale boulot. Mais ce  n’était qu’un stratagème. En réalité, le règlement intérieur  ne devait pas lui accorder  ce droit  à ce moment là car il lui manquait quelques mois pour avoir une ancienneté de …5ans, susceptible de justifier une telle somme  lors de son départ ! Ce qui conduira son successeur à lui faire signer  un « contrat à durée déterminée » taillé sur mesure pour percevoir  ensuite cette retraite chapeau annoncée tout récemment.
 
Ainsi avons-nous appris  qu’il percevrait moins que  la somme annoncé en 2013. Mais il s’agit quand même de 300.000€ brut par an en plus de  la retraite pour laquelle il a cotisé comme tout un chacun et qui ne saurait être comparée à celle d’un ouvrier de Citroën. Ici apparaît un scandale que l’émission de Pierre Weill se garda bien d’aborder.
 
Ces quarante dernières années , des millions de retraités, mais aussi  d’actifs plus ou moins proches de la retraite,   ont vu leur pension ou future pension de retraite gravement amputée par des licenciements économiques, des périodes de chômage et des reprises d’activité avec un salaire réduit dans un nouveau métier du fait des décisions prises par des hommes comme Philippe Varin à la tête de grandes sociétés. Beaucoup de  travailleurs aux carrières brisées n’étaient même pas des salariés directs de grandes entreprises comme Peugeot ou Citroën, mais de leurs équipementiers que les donneurs d’ordre ont pillé de plus en plus au fil des ans afin de dégager plus de profits pour les sociétés cotées en Bourse.
 
C’est même pour leur «capacité» à dégager des taux de profits de plus en plus élevés sur de courtes périodes  que des PDG comme Philippe Varin ont été gratifiés de retraites chapeau, de  primes liés aux rendements financiers qui sont la part « variable » du salaire dès lors que leur stratégie  fait monter provisoirement le prix de l’action et le bénéfice sur quelques exercices. Et tant pis si cette stratégie de court terme débouche à un moment ou à un autre sur une fermeture d’usine comme à Aulnay !  Voilà aussi pourquoi les rémunérations patronales liées aux rendements financiers conduisent souvent à fragiliser de grandes entreprises  faute de stratégie industrielle tournée ver le long terme. Voilà des tas de questions que Pierre Weill aurait pu et aurait du poser à ses invités.
 
Pourquoi ne l’a-t-il pas fait ? Pourquoi n’y avait-il pas un syndicaliste de PSA  parmi ses invités face à trois défenseurs des retraites chapeau? 
Enfin, dans quel pays de droit sommes nous  quand on permet à des individus qui ont ruiné la carrière de milliers de salariés et amputé de ce fait leurs droits futurs à une bonne retraite  de percevoir ,eux, une seconde pension (de 25.000€ par mois dans le cas qui nous occupe)  pour laquelle ils n’ont pas cotisé et que l’entreprise qu’il ont malmenée doit pourtant provisionner pour leur servir cette retraite indue jusqu’à leur mort ?
 
Aucune de ces questions ne fut posée lors de l’émission de France Inter le 14 mai dernier. Nous sommes en droit d’attendre autre chose d’une radio du service public. Mais pour qui donc roulez-vous monsieur  Pierre Weill ? Le confrère qui vous pose cette question est titulaire de la carte de presse 52622 obtenue en avril 1984, quelques mois après avoir été viré d’une usine où il fabriqua des pneus pendant près de 18 ans !
 
Gérard Le Puill, l'Humanite.fr
 
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05/09/2011

LYBIE : JOURNALISTES OU MARIONNETTES ?

libye.jpgVous lirez, ci-dessous, la copie d’un courrier qu’une auditrice a adressé aux rédacteurs de « France Inter ». Ceci pour leur rappeler que la liberté de la presse n’est pas un droit pour les journalistes mais un droit des gens à être correctement informés ; que le devoir de chaque journaliste est d’informer le public dans le respect de la vie humaine, dans le respect que l’on doit aux victimes ; qu’il est d’autant plus impératif que les journalistes envoyés dans des pays en guerre s’attachent à éclairer des faits que les puissances belligérantes s’emploient à camoufler.

 

Des journalistes aux ordres

france inter,journaliste,lybieEn 2003, la France s’oppose à la seconde guerre d’Irak, les journalistes de la radio nationale soutiennent alors la décision de leur gouvernement. Ils défendent la légitimité morale de ne pas attaquer un pays souverain.

En 2011, le pouvoir en France a changé de mains et dès l’annonce de la résolution du Conseil de Sécurité de l’Onu, les journalistes de « France-Inter » se sont mis en rang derrière la coalition occidentale et l’Otan. Ils ont systématiquement rapporté et commenté les événements depuis la perspective des « rebelles ». Leurs experts en tous genres entendus à l’antenne renforcent régulièrement ce parti-pris.

Pourtant à leur corps défendant, les mensonges se dévoilent parfois d’eux-mêmes. Ainsi « Le téléphone sonne » du lundi 22 août, animé de façon enjouée par le journaliste et ses invités alors que Tripoli est sous les bombes de l’Otan, commence par évoquer la nécessité de « protéger les civils » en Libye pour en venir somme toute assez vite à la véritable nécessité : l’Europe doit se rendre maître des moyens de sa puissance si elle veut encore exister entre les États-Unis et la Chine.

« Radio-Paris ment, Radio-Paris ment, Radio-Paris lalala.... »

« France-Inter en dit tant, France-Inter en fait tant, France-Inter est pour l’Otan ! »

 

Un langage désobligeant, violent et indécent.

Puisqu’officiellement, il n’y a pas de guerre en Libye, que l’Otan est venu au secours d’un peuple qui lutte pour la démocratie, il ne reste qu’un seul personnage à abattre, le Colonel Kadhafi et les « quelques fidèles qu’il compte encore »...

La Libye demeure néanmoins pour l’heure un État souverain. Un État qui n’a violé aucune résolution de l’Onu, qui n’a menacé ni attaqué aucun autre État, proche ou lointain.

Les journalistes vont alors docilement jouer le rôle qu’ils ont accepté de jouer : ridiculiser, discréditer et diaboliser le dirigeant de la Libye et ignorer les nombreux Libyens qui ne sont pas d’accord de voir leur pays détruit par des envahisseurs étrangers. Ces journalistes n’ont aucun problème à répéter que Kadhafi est « un criminel », « un tyran » détesté, « un dictateur » redouté, qu’il amuse parfois la galerie avec ses « bouffonneries ». Ses déclarations ne sont que des « diatribes », il « harangue ses partisans » qui sont des gens « impitoyables », « le numéro 1 libyen est-il fou ? », etc..., etc...

L’arrestation non vérifiée de deux de ses fils est annoncée comme une nouvelle réjouissante. Les mauvais traitements que subissent les prisonniers ne les dérangent pas. Alors que des images permettent de comprendre que les rebelles se conduisent en barbares et procèdent à des exécutions sommaires, les journalistes les suivent comme s’ils étaient des héros, ils vont même jusqu’à les trouver « sympathiques », et ils présentent leurs actes de barbarie comme des victoires !

Le sommet de l’indécence est atteint quand les rédactions des différents journaux acceptent d’annoncer une fois encore d’un ton plaisant que « la tête de Kadhafi est mise à prix à .... de dollars » ! Quelle barbarie ! Auditrice de « France-Inter » à qui une telle information est destinée, je suis remplie d’effroi : comment est-il possible de diffuser de tels messages piétinant toutes les règles du droit national et international ? Tous les droits humains fondamentaux ? Comment la radio nationale publique peut-elle se faire complice d’une incitation au meurtre pur et simple d’un être humain en dehors de tout tribunal ?

 

Des reportages de perroquet.

france inter,journaliste,lybiePourquoi avoir des « envoyé,e,s spéciaux » s’ils sont « Embedded » ? Pour faire illusion sur l’authenticité et la réalité des enquêtes sur place ? Au fil des comptes rendus et des entretiens avec « les correspondant,e,s », on est fixé sur le manque de sérieux et l’objectivité de leur travail.

Ainsi, les journalistes envoyés en Libye nous abreuvent de témoignages individuels d’ « insurgés » s’exprimant souvent en anglais, sans intérêt parce qu’ils n’éclairent rien et n’apportent aucune information sur ce qui se passe réellement, sur ce que ressent la population que l’on ne voit pas. Ou encore, de leur propre aveu, ils rapportent des rumeurs. Quand il y en a, les communiqués lacunaires de l’Otan sont fidèlement répétés, ponctués de ce commentaire puéril : « On n’en saura pas plus » !

A Paris, à la rédaction de « France-Inter », on entend des journalistes connus, qui ont des années de métier, dont les commentaires se situent invariablement du côté des rebelles et des forces de l’Otan ; leurs analyses se bornent à évaluer ou à vanter les moyens d’action aérienne, navale, et terrestre de la plus puissante organisation militaire du monde contre un petit pays de 6 millions d’habitants.

Par ailleurs, bien qu’il soit établi que les membres du Conseil de transition soient pour la plupart d’anciens hauts responsables du gouvernement de Kadhafi qui, lui, doit être liquidé, les journalistes de France-Inter évitent soigneusement de parler de leur activité passée et de mener des enquêtes à leur sujet.

 

La responsabilité du « crime contre la paix ».

Le contrôle de l’information constitue le premier acte de la guerre. Un journaliste qui se met au service d’un camp renonce de facto à exercer son métier. Ridiculiser, diaboliser, répandre sans vérification des informations incitant au mépris, à la haine et au meurtre contre le camp des perdants, engage la responsabilité de celles et ceux qui contribuent ainsi à la guerre. Ils prennent de graves responsabilités car ils devront répondre de « crime contre la paix », tel que défini par la Charte des Nations Unies en 1948. En plus de devoir rendre des comptes à leur conscience, ils pourraient un jour avoir à rendre des comptes publiquement.

Dans un article récent, Thierry Meyssan, actuellement en danger à Tripoli sous la férule des « démocrates » du Conseil de transition, rappelle précieusement « qu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l’Assemblée générale des Nations Unies a par quatre fois légiféré pour interdire et condamner ce type de pratique.

La Résolution 110, du 3 novembre 1947, relative aux « mesures à prendre contre la propagande en faveur d’une nouvelle guerre et contre ceux qui y incitent », sanctionne « la propagande de nature à provoquer ou à encourager toute menace à la paix, rupture de la paix, ou tout acte d’agression ».

La Résolution 381, du 17 novembre 1950, consolide cette condamnation en condamnant la censure des informations contradictoires comme partie intégrante de la propagande contre la paix.

Enfin, la Résolution 819, du 11 décembre 1954, sur « la suppression des obstacles au libre échange des informations et des idées », pose la responsabilité des gouvernements à supprimer les obstacles qui entravent le libre-échange des informations et des idées.

Ce faisant, l’Assemblée générale a élaboré sa propre doctrine en matière de liberté d’expression : elle a condamné les mensonges qui conduisent à la guerre et a érigé la libre-circulation des informations et des idées et le débat critique en armes au service de paix. »

Michelle Verrier

Philosophe

(Courrier adressé à «France Inter» par Mme Michelle Verrier le 28 août 2011)

 

17:33 Publié dans Actualités, Radio | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : france inter, journaliste, lybie | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | |