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04/03/2024

France: quelle place pour la guerre de Gaza dans les JT de 20h?

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Le massacre du 7 octobre et le début d'une nouvelle guerre dans la bande de Gaza ont créé une onde de choc médiatique planétaire. Pourtant, après 150 jours de guerre et plus de 30 500 morts, la couverture médiatique du conflit est irrégulière sur le petit écran des Français

Le 7 octobre, en quelques minutes, la guerre en Ukraine avait disparu des médias. Pour un instant seulement. À la différence de la guerre en Ukraine qui depuis février 2022 conserve une part importante dans le paysage audiovisuel français, la guerre qui se déroule dans la bande de Gaza semble tombée aux oubliettes, principalement à la télévision, alors que le conflit se durcit chaque jour un peu plus et que le bilan des morts ne cesse de croître.

« Il y a une invisibilisation des Palestiniens, et de manière générale une invisibilisation de l'ensemble du conflit, très mal traité ou peu traité. C’est un vrai manquement au devoir d'information, tout simplement. C’est une catastrophe, un naufrage. » Le constat de Célia Chirol est sans appel. Doctorante et chercheuse en anthropologie des médias, elle est la première à s’être penchée sur la couverture médiatique de la guerre à la télévision française lors de la grand’messe du 20h sur les chaînes traditionnelles que sont TF1, France 2 et M6, soit 12,5 millions de téléspectateurs au total. À l’origine, une interrogation : pourquoi aucun JT n’a relaté l’audience historique de la CIJ ? « Sur les 20 JT analysés du 8 au 14 janvier, seulement 29 secondes de temps d’antenne ont été consacrées à Gaza et au sort des Palestiniens. Plus en détails, cela donne 5 secondes pour TF1, 10 secondes pour M6 et 14 secondes pour France 2. » Et encore, en fin de journaux et après les affres d’Alain Delon ou le dernier clip de Jennifer Lopez.

L’émission Arrêt sur images a de son côté pris la suite des travaux de Célia Chirol pour un constat identique : du 4 au 15 février durant les JT de 13 h et de 20 h de TF1 et de France 2, « le sort des Gazaouis ne fait l'objet d'aucune séquence dédiée, que ce soit avec un reportage ou en plateau. Et aucun journal, d'aucune chaîne, n'a indiqué sur cette période de bilan chiffré du nombre total de morts à Gaza (…) À l'inverse, les otages israéliens, ainsi que les annonces de l'État hébreu, bénéficient d'une couverture médiatique. »

« Cela peut sembler au premier abord paradoxal, mais les silences font partie du bruit médiatique, et s’intéresser à ce qui est tu, n’a pas moins d’intérêt que s’intéresser à ce qui est dit », analyse de son côté l’observatoire des médias Acrimed qui note « le processus d’invisibilisation de la petite bande côtière assiégée et bombardée et, plus globalement, des Palestiniens ».

Une lassitude du public ?

« Lorsqu’un événement, y compris un événement très fort, se produit, même s'il se prolonge, il y a toujours un phénomène qui conduit à une espèce d’épuisement. C’est un phénomène assez classique qu'on retrouve particulièrement dans les situations de guerre ou de crise », analyse Jean-Marie Charon, sociologue spécialisé dans les médias. Pourtant, la guerre en Ukraine continue d’être traitée, voire d'être au centre de la ligne éditorial du média, comme à LCI. Certains invoquent le fait que le public français se sent plus impliqué dans ce conflit, parce que plus proche de lui. « D’autres rétorqueront que les États-Unis, dont les chaînes françaises parlent énormément, sont géographiquement plus éloignés que le Proche-Orient... », nuance le sociologue.

Pour Jean-Marie Charon, un autre élément est également à prendre en compte : le conflit israélo-palestinien, qui date depuis bien avant le 7 octobre, parce qu’il est trop compliqué à comprendre par le public, parce qu’il dure depuis trop longtemps et qu’il semble sans issue, ne préoccupe plus.  « Je pense qu'il y a quelque chose qui se surajoute dans la question de la région et de Gaza : un phénomène de complexité. C'est incontestablement, si on compare là encore avec l’Ukraine, beaucoup plus complexe à analyser. Il y a à la fois des aspects historiques, des aspects liés à des cultures différentes, des aspects liés à des contextes politiques, etc. Donc là, il y a tous ces éléments qui sont perçus comme des éléments de complexification et qui là aussi peuvent amener à dire : "On ne va pas y revenir sans arrêt, de toute façon le public trouve que c'est trop compliqué". »

En 2015 déjà, Acrimed parlait du traitement du conflit israélo-palestinien en le comparant au « syndrome de Tom et Jerry » : « [Le spectateur] ne sait pas pourquoi ces deux-là se détestent, on ne lui a jamais expliqué pourquoi Tom et Jerry ne peuvent pas parvenir à une trêve durable, voire une paix définitive. […] Il devra se contenter d’une couverture médiatique qui se focalise sur la succession des événements, sans s’interroger sur les causes profondes ou sur les dynamiques à long ou moyen terme. »

Depuis une vingtaine d’années, les études, dont celle menée par La revue des médias, montrent en effet que la couverture du conflit israélo-palestinien est en baisse. Charles Enderlin, correspondant de France 2 en Israël entre 1981 et 2015, avançait en 2021 quelques explications : l’impression, chez les directeurs de rédaction, « que le conflit israélo-palestinien a perdu de son importance », la « crainte de se retrouver face à des réactions extrêmes, de la part des deux camps ». Et La revue des médias de rappeler les pressions infructueuses exercées par l’ambassade d’Israël, le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) ou le Consistoire central israélite, pour empêcher la diffusion, en 2018, du reportage d’Envoyé spécial (France 2), Gaza, une jeunesse estropiée.

Un sujet brûlant

Célia Chirol y voit aussi le fait que le sujet, en France, soit tabou et exacerbe les tensions. « Il y a aussi une autocensure de la part des médias, parce que ce conflit-là, au-delà de la complexité qu'on veut lui donner, et qui en fait n’est pas si complexe que ça, est un sujet trop "touchy" [sensible]. Il y a toujours les risques d'être accusé de ceci ou de cela… Voir par exemple l’affaire du journaliste de TV5 Monde Mohamed Kaci lors d'une interview avec un porte-parole de l'armée israélienne. 

Pascal Boniface, chercheur à l’Iris, résume la couverture médiatique du conflit israélo-palestinien en quelques mots : « La France est dans le camp occidental, et Israël en fait partie ; et cela se voit sur le plan médiatique ». Chaque mot et chaque terme employé sont scrutés à la loupe, les acteurs de la propagande, des deux côtés, étant prompts à faire feu de tout bois. 

Dès lors, pour suivre en temps réel la guerre dans la bande de Gaza, les Français doivent se tourner vers les télés étrangères ou ayant une visée internationale qui, elles, ont conservé leur couverture de la tragédie qui se déroule en direct sur BBC, CNN, France 24 ou Al-Jazeera qui couvre le conflit en temps réel 24h/24.

Traiter le conflit israélo-palestinien en France n’est pas une mince affaire, mais en dehors de la télévision, la presse écrite et les radios ainsi que leurs sites internet continuent de couvrir, à des degrés divers et bien moins que les premières semaines qui ont suivi le 7 octobre, les événements dans la bande de Gaza – et en Cisjordanie occupée - en tentant de se tenir au plus près des faits et de garder la neutralité dont doit faire preuve le métier. Autre difficulté, dans la bande de Gaza, les journalistes sont aussi les victimes et les cibles - plus de cent parmi eux ont été tués depuis le 7 octobre, tous Palestiniens - et Israël interdit aux médias étrangers de se rendre sur le terrain, une première dans un conflit armé.

Le drame survenu à Gaza jeudi 29 février lors d'une distribution humanitaire qui a fait quelque 700 blessés et 110 morts selon le Hamas (« Plusieurs dizaines de victimes » selon l'armée israélienne), a subitement ramené la guerre à Gaza à la Une des titres des JT. Un peu comme si la guerre à Gaza selon les JT était en pointillés. Peut-être le signe d'un format d'information datant de l'ORTF et aujourd'hui devenu obsolète, à l'heure des réseaux sociaux et du tout-digital.

Source RFI

13/09/2023

Qui sont les six milliardaires qui possèdent les principaux médias français

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Aujourd’hui, les milliardaires l’assument, sans aucun complexe. D’autant que la presse et les médias, pris dans les tempêtes de la révolution numérique, ont des problèmes drastiques d’argent. Les milliardaires arrivent comme des sauveurs, mais toujours avec une arrière-pensée politicienne, qui prend en otage salariés et lecteurs ou spectateurs du média concerné.

Vincent Bolloré, le papivore

Sa fortune est estimée à 10 milliards de dollars. Vincent Bolloré a investi dans plusieurs secteurs industriels. Depuis 2012, et sa prise de pouvoir à la tête de Vivendi, il collectionne les médias (Canal PLus, CNews, C8, Europe 1, le JDD, Paris Match…). Il détient aussi 74 % du marché des manuels scolaires.

Patrick Drahi, l’endetté

Le patron d’Altice (SFR, BFM…) a une fortune personnelle qui s’élève à 4,2 milliards de dollars. Son groupe est endetté à hauteur de 60 milliards d’euros… Il est à la tête de BFMTV, de RMC, l’Étudiant, soutient Libération.

Xavier Niel, le discret

Huitième fortune française, il est le fondateur de Free en 2006. Depuis, il a largement investi dans la presse. Il est devenu en 2010 un des actionnaires principaux du journal le Monde. Il possède le groupe Nice-Matin, a racheté France-Antilles en faillite en 2020 et a financé le lancement du journal l’Informé.

Daniel Kretinsky, entre l’énergie et les médias

Avec une fortune de 9,2 milliards de dollars, Daniel Kretinsky a démarré en investissant dans les mines et les centrales à charbon en Europe de l’Est. L’homme d’affaires s’implante dans les médias français à partir de 2018 : il détient désormais les magazines Elle, Télé 7 jours, Franc-Tireur ou encore Marianne.

Bernard Arnault, le plus riche

Avec sa fortune de 238,5 milliards de dollars, le PDG et actionnaire majoritaire du groupe de luxe LVMH est le plus riche parmi les riches. Il possède les journaux le Parisien et les Échos, la revue Connaissance des arts, le site Investir ainsi que Radio Classique. En 2019, il a fait espionner François Ruffin, le rédacteur en chef de Fakir, depuis devenu député.

Rodolphe Saadé, la force montante

Depuis novembre 2017, il est à la tête du groupe CMA CGM, l’une des plus grosses compagnies maritimes, dont sa famille détient 73 % des parts. La fortune du chef d’entreprise s‘élève à 41,4 milliards de dollars. Il a racheté la Provence et la Tribune, est entré au capital de Brut et a des parts dans M6.

Source l'Humanite

18/12/2021

Zemmour face à Hanouna, une vision alarmante du débat démocratique

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Jeudi, sur C8, chaîne du groupe Bolloré, Cyril Hanouna lançait “Face à Baba”, une émission pensée sur mesure pour recevoir le candidat d’extrême droite. Un spectacle affligeant, contraire à toute exigence journalistique et démocratique.

Il y a encore deux ans, Cyril Hanouna affirmait qu’il ne recevrait jamais Éric Zemmour sur son plateau. Mais ça, c’était avant que le polémiste d’extrême droite, ex-figure de proue de CNews et chouchou de Vincent Bolloré, ne lance sa campagne médiatique en vue de l’élection présidentielle. « Dès qu’il arrive sur un plateau, on sait que l’audience va décoller », salivait l’animateur en septembre dans Touche pas à mon poste (TPMP), lorgnant déjà la possibilité de faire un coup en l’invitant sur C8.

Ce jeudi 16 décembre, après des semaines de teasing, il lançait donc Face à Baba, une nouvelle émission de débat, créée sur mesure pour recevoir Éric Zemmour en prime time. Un coup d’audience, assurément : la première partie du show (long de plus de trois heures) a réuni 2,2 millions de téléspectateurs, soit 10,5 % de part de marché. Mais surtout, un coup supplémentaire porté aux principes du débat démocratique.

Le concept : dix personnalités affrontent à tour de rôle Éric Zemmour lors de « matchs » de dix minutes. Mais ça, c’était sur le papier : en réalité, la production a convié « cinq personnes qui sont plutôt contre lui, et cinq qui sont plutôt avec lui, pour qu’on soit dans une équité totale », expliquait Cyril Hanouna dans TPMP quelques minutes avant le démarrage de Face à Baba, rappelant ainsi sa conception du débat d’idées. Il le répète à l’envi : pour lui, qui n’est pas journaliste mais animateur de divertissement, les journalistes politiques sont « agressifs ». « Je ne suis pas là pour insulter ou invectiver […] Ce soir, je ne veux pas d’agressivité », annonce-t-il donc d’emblée.

Un hymne au groupe Bolloré

En plateau, Garen Shnorhokian, porte-parole des Amis d’Éric Zemmour, exulte : « Vous êtes l’un des plus grands démocrates de ce pays. » « On a une liberté totale, on fait ce qu’on veut », répond Cyril Hanouna, dans une hallucinante tirade vantant la liberté d’expression qui régnerait dans le groupe Bolloré. « C’est ça qui est incroyable dans ce groupe, et la liberté qu’on a sur C8, je crois qu’on ne l’aura nulle part ailleurs. À TF1, quand y a une émission politique, toute la direction se mêle de savoir quelles questions vont être posées. Ici, je vous le dis, c’est la magie de C8. » Il fallait oser, alors que le magnat Vincent Bolloré exerce une censure brutale dans les médias qu’il rachète les uns après les autres, menaçant toujours plus la liberté d’expression

Annoncé comme le grand adversaire de la soirée, l’acteur-réalisateur Mathieu Kassovitz est finalement coincé chez lui, positif au coronavirus. Après sa question enregistrée, c’est l’écrivain Aymeric Caron qui ouvre véritablement le bal, ulcéré, débordant, refusant quasiment à Éric Zemmour le droit de répondre à ses offensives. Dans le chaos habituel des émissions de Cyril Hanouna, incapable d’orchestrer le débat, les opposants Karim Zéribi, chroniqueur CNews et C8, le député Insoumis Alexis Corbière ou encore Élisabeth Moreno, ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, tentent avec plus ou moins de sang-froid de contredire l’idéologie d’Éric Zemmour.

17/12/2019

Grève des transports : France 2 n’est jamais fatiguée des usagers fatigués

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Tous les soirs à 20 heures, France 2 documente la fatigue et l’inquiétude des usagers des transports et des trottoirs. Sur BFMTV, on continue de considérer que “les Français” ne sont pas concernés par la réforme des retraites, seulement par les fêtes de fin d’année.

« A la une, neuvième jour de grève, le gros coup de fatigue des usagers », déplore Laurent Delahousse vendredi. Le 20 heures de France 2, lui, n’est pas fatigué de réaliser chaque jour les mêmes reportages sur la fatigue des usagers. « Les usagers, notamment en Ile-de-France, développe le présentateur, commencent à montrer des signes de grosse fatigue. » Certains s’endorment même devant le JT. « Les annonces d’aucune trêve durant les fêtes de Noël par certains syndicats fragilisent encore la situation. » Euh… pardon ? Les annonces fatiguent les usagers par anticipation ? Le pouvoir de nuisance des syndicats est proprement surnaturel.

« Ce soir, décrit la reporter, la scène se répète. » Comme tous les soirs au JT. « Bousculade et panique pour entrer dans le RER. Comme dans une fourmilière. » Et comme tous les soirs au JT. « Ce matin, pour accéder aux quais du métro bondé, il fallait attendre son tour. Les nerfs de certains lâchent. » « La grève, pourquoi ?! Les bâtards ! », hurle le voyageur d’une vidéo amateur. « Pour d’autres, c’est l’épuisement. » Paroles d’usagers : « Tout le monde est fatigué, tout le monde galère. » « On est au bout du rouleau. On a envie de faire un arrêt de travail. »

« Transports en commun saturés, embouteillages permanents…, gémit la journaliste. Pour ceux qui arrivent au bureau, c’est aussi l’épuisement. » Euh… pardon ? Ceux qui sont épuisés par le trajet jusqu’au boulot sont aussi épuisés au bureau ? C’est incompréhensible. Normalement, le seul fait de se mettre au service de son employeur suffit à gommer toute fatigue. « Pour cette directrice des ressources humaines, il faut revoir toute l’organisation. » Pour toute directrice des ressources humaines, les salariés sont des « collaborateurs » : « Les collaborateurs rentrent plus tôt, partent plus tard. » Il faudrait savoir. « Et il y a aussi la fatigue morale. » Les « collaborateurs » sont morts d’inquiétude à l’idée que les syndicats pourraient les priver d’une réforme qui ne fera que des gagnants.

« Des salariés assommés, épuisés », insiste la journaliste de France 2, qui s’épuise à répéter le mot « épuisé ». « Ils sont désormais de plus en plus nombreux à poser des arrêts maladie. » Euh… pardon ? Sur France 2, on « pose » des arrêts maladie ? Même pas besoin de consulter un médecin ? « C’est ce que remarque ce médecin depuis quelques jours. » Je ne comprends plus. « J’ai constaté des patients fatigués, exténués par les transports, les 600 kilomètres de bouchons… » Si ses patients parcourent 600 kilomètres de bouchons par jour, je comprends qu’ils soient exténués. « Ils sont venus me solliciter pour demander soit des vitamines, soit des arrêts de travail. » Qu’ils pourront ensuite « poser » à leur guise.

« Malgré la fin de la semaine, le week-end est loin de s’annoncer de tout repos, désespère la reporter. En pleines courses de Noël, la situation dans les transports restera compliquée. » Les consommateurs épuisés poseront-ils des arrêts maladie pour échapper aux courses de Noël ?

« Une séquence de bras de fer social qui pousse de nombreuses personnes à s’élancer à pied pour rejoindre leur travail, reprend Laurent Delahousse. Un itinéraire que nous avons effectué aujourd’hui à Paris aux côtés de plusieurs salariés. » Euh… pardon ? Un itinéraire de bras de fer à pied ? Le reportage est titré « Grève des transports : à marche forcée » — à défaut de « marche ou crève ».

« Voilà un moyen de transport sur lequel on peut compter : ses pieds, assure la reporter. Ce matin, ils étaient nombreux à arpenter pour aller travailler. » Pour l’occasion, arpenter est devenu un verbe intransitif. « Les moins sportifs battent des records. » Une marcheuse montre une application sur son téléphone : « Pour mercredi, 11 442 pas. » « Ah tout de même ! », s’exclame la journaliste. Rappelons que la moyenne conseillée par les autorités de santé est de 10 000 pas par jour. « Pour jeudi, ça indique 9,3 kilomètres. » « 9 kilomètres à pied, c’est ce que vous faites d’habitude ? » « Non, pas du tout. Mais ça va faire grand plaisir à mon médecin généraliste quand je vais lui dire. » Ce ne doit pas être le médecin du reportage précédent.

« Une séance de sport dont se serait bien passé ce jeune homme qui travaille de nuit dans la restauration. » « J’en ai pour trente minutes alors que j’en ai pour cinq minutes en RER donc ça me fatigue. » Trente minutes de marche ? Un calvaire. « Nous accompagnons Julie, elle s’apprête à marcher quarante-cinq minutes… Et gare aux embouteillages de trottoir. » Avec 1 450 kilomètres, le record des bouchons de trottoir a d’ailleurs été battu la semaine dernière à Paris. « La journée sera longue, conclut la reporter. Alors, une fois arrivés au travail, ceux qui se sont équipés pour utiliser leurs pieds doivent savoir aussi les récompenser. » La voici qui enfile des pantoufles.

Ça me fait tout drôle de voir réapparaître Laurent Delahousse en sachant désormais qu’il porte des pantoufles sous la table du 20 heures. « Jean-Pierre Farandou, le nouveau pdg de la SNCF, demande aux grévistes de faire un pause durant les fêtes. » Et de reporter leur grève après l’adoption de la réforme.

Le 20 heures consent tout de même un reportage dans les familles de deux grévistes de la SNCF pour documenter leurs propres sacrifices. Puis Laurent Delahousse évoque la réforme elle-même. « L’un des reproches fait à l’exécutif concerne le flou, l’absence de pédagogie qui entoure cette réforme complexe. » Avec un peu de pédagogie, les grévistes reprendraient immédiatement le travail. « La valeur du point de ce système par points mérite bien justement un petit point. » Le présentateur ne lésine point sur les points.

Ça me fait tout drôle de voir réapparaître Laurent Delahousse en sachant désormais qu’il porte des pantoufles sous la table du 20 heures. « Jean-Pierre Farandou, le nouveau pdg de la SNCF, demande aux grévistes de faire un pause durant les fêtes. » Et de reporter leur grève après l’adoption de la réforme.

Le 20 heures consent tout de même un reportage dans les familles de deux grévistes de la SNCF pour documenter leurs propres sacrifices. Puis Laurent Delahousse évoque la réforme elle-même. « L’un des reproches fait à l’exécutif concerne le flou, l’absence de pédagogie qui entoure cette réforme complexe. » Avec un peu de pédagogie, les grévistes reprendraient immédiatement le travail. « La valeur du point de ce système par points mérite bien justement un petit point. » Le présentateur ne lésine point sur les points.

« À la une ce soir, récidive Laurent Delahousse le lendemain, la grève ou la trêve pour les fêtes de Noël ? » Le titre questionne : « Grève, y aura-t-il des trains à Noël ? » Curieusement, il ne demande pas s’il y aura toujours une réforme des retraire à Noël. « Une incertitude qui inquiète les usagers, les commerçants et qui pèse sur le gouvernement. » Mais pas sur les grévistes, qui ne fêtent pas Noël.

« On commence par des images qui suscitent depuis quelques heures beaucoup de réactions et d’indignation, propose Laurent Delahousse. Que s’est-il passé à Saint-Ouen, dans l’enceinte du stade du Red Star ? L’ex-championne du monde de natation et vice-championne olympique devenue ministre, Roxana Maracineanu, assistait à la rencontre de football à titre privé. Un attroupement se forme, les insultes pleuvent, la forçant à quitter le stade. » « Tout dérape », témoigne le reporter. A mon avis, la ministre a été victime d’usagers excédés et fatigués de devoir aller jusqu’au stade à pied.

Laurent Delahousse travaille sa transition : « Une affaire qui résonne dans un contexte de colère et de questionnement sur l’avenir et l’impact du conflit des retraites. » La colère et le questionnement des usagers, bien sûr, mais pas seulement : « C’est un scénario que les commerçants redoutaient qui se dessine depuis quarante-huit heures. » Pauvres commerçants, principaux bénéficiaires de la compassion de France 2 qui leur consacre de nombreux sujets mais néglige les travailleurs précaires et sous-payés des lointaines banlieues dont le salaire sera amputé des heures de travail manquées, comme le notait Arrêt sur images. « Moins 30 % de fréquentation dans les magasins, rapporte une journaliste. Le représentant des petits commerçants tire la sonnette d’alarme. » Pour pouvoir la tirer, il a au moins réussi à monter dans un train ou un métro.

« À huit jours des vacances, reprend Laurent Delahousse, le bras de fer se durcit entre gouvernement et syndicats sur la question d’une potentielle trêve de Noël. Entre les deux, les usagers eux voient l’échéance arriver avec inquiétude. » Paroles d’usagers aussi inquiets que fatigués (d’être inquiets). « Hier, dans une vidéo interne, le nouveau patron de la SNCF a lancé un appel aux grévistes. » Pour leur demander de repousser leur grève après l’adoption de la réforme.

« Autre secteur économique qui suit de près la situation, alerte Laurent Delahousse, c’est celui du tourisme et particulièrement celui des stations de sports d’hiver. » Un secteur qui passionne aussi intensément les JT autant qu’il concerne une infime minorité de Français (seulement 7 % d’entre eux partent en vacances d’hiver au moins un an sur deux). « Elles jouent gros et justement les perturbations sur le trafic ferroviaire sont le socle des réservations. » Euh… pardon ? Les perturbations du trafic ferroviaire sont le socle des réservations ? Pourvu qu’il y ait beaucoup de perturbations afin d’assurer un bon niveau de réservations. À La Plagne, le reporter interroge notamment de pauvres propriétaires de logements et un modeste couple qui a réussi à parvenir jusqu’à la station mais qui ne sait s’il pourra en repartir.

Le dimanche soir, c’est au tour du présentateur de BFMTV Gilane Barret de proposer : « Parlons de la vie des Français. » Mais pas de n’importe quels Français « C’est une nouvelle semaine très compliquée qui s’ouvre pour les Français. » Rappelons que les grévistes, les manifestants et les personnes concernées par la réforme des retraites ne sont pas français. « La paralysie dans les transports se poursuit. Les Français déjà fatigués et même énervés vont devoir faire avec. » La parole est aux Français fatigués et énervés.

« Question pratique, que peut faire un gouvernement face à une telle grève pendant les fêtes ?, interroge Gilane Barret. Est-ce qu’il peut aller plus loin dans des réquisitions ? » Envoyer l’armée pour mettre les conducteurs dans leurs trains ? « Est-ce qu’il en fait assez pour assurer les meilleures fêtes possibles aux Français ? » Rappelons que, n’étant pas français, les grévistes, les manifestants et les personnes concernées par la réforme des retraites ne fêtent pas Noël.

Michel Sapin, un invité de saison, répond : « Si le gouvernement avait voulu éviter ce problème au moment des fêtes, il ne fallait pas faire une annonce qui était une agression pour la totalité de syndicats juste avant les fêtes. » « Donc, erreur de timing, déduit Gilane Barret. Il fallait faire ça en janvier ? » Ou, mieux, le 3 août. « Est-ce qu’il faut faire une trêve de cette grève… ou bien une trêve de la réforme jusqu’en janvier ? » « Laurent Berger a la bonne attitude, juge Michel Sapin. Il dit que son objectif n’est pas d’embêter les gens à Noël. » Il a même réclamé ce lundi matin une trêve pour les fêtes (comme le gouvernement). Et assuré qu’il désirait continuer à travailler avec Jean-Paul Delevoye (comme le gouvernement)… quelques heures avant que le haut-commissaire démissionne.

Michel Sapin, comme Laurent Berger, milite pour la suppression de « cette histoire de l’âge pivot ». « La CGT voudra quand même continuer », désespère Gilane Barret. Et de conclure : « Ne manquez pas mardi notre émission spéciale sur BFMTV : “La grève, jusqu’à quand ?” Bonne question. » On ne se lasse pas de la poser. Le titre de la précédente émission spéciale de BFMTV, mercredi dernier, était « Grève, stop ou encore ? » Curieusement, la chaîne ne titre jamais « Réforme de retraites, stop ou encore ? » ni « Réforme des retraites, jusqu’à quand ? »

La pub déboule. Message de prévention du gouvernement : « Dans la vie, il y a des moments qui comptent plus que d’autres. (…) Des moments où l’on décide d’être son propre patron. (…) On a tous une bonne raison de faire le test du VIH et des infections sexuellement transmissibles. » Se faire dépister parce qu’on crée son entreprise ? Je ne vois pas bien le rapport. Jusqu’où va se nicher le mythe de la start-up nation dans laquelle chacun est entrepreneur de soi-même — et de sa retraite…

Sources Samuel Gontier Télérama