16/12/2015
Lancée après "Charlie Hebdo", une nouvelle web série décrypte les médias avec humour et pédagogie
Sur un ton ludique et accessible à tous, la web série "Les Clés des médias" décrypte l'information et dévoile les coulisses du journalisme et des médias. Initié par France Télévisions après les attentats de janvier, le projet est aussi ludique qu'indispensable. "Les vidéos de chat sur Internet, ça occupe cinq minutes, mais ça n'a aucun intérêt", indique le journaliste de France Inter Bruno Duvic dans un des épisodes de la nouvelle websérie d'éducation aux médias que vient de lancer France TV Education.
La phrase est provocante, frappante, elle parle aux plus jeunes. Elle permet surtout d'illustrer l'un des premiers épisodes des "Clés des médias" intitulé "C'est quoi une info?" "Un journaliste, qu'est ce que c'est?", La pub, ça sert à quoi?", "La rumeur", "Les Youtubers", "Le droit à l'image" : en tout, "Les Clés des médias" proposent de répondre à vingt-cinq questions (neuf sont déjà en ligne) que peut se poser le public. Le projet est né après les attentats de janvier contre Charlie Hebdo, alors que la liberté d'expression avait été attaquée ou que la théorie du complot naissait ici ou là. "Il s'agit d'expliquer les mécanismes des médias, de revenir sur des notions de base, de répondre à la défiance que le public a des journalistes et d'ouvrir le débat", précise Bruno Duvic, qui a écrit l'ensemble de la série produite par la Générale de production avec FranceTV Education, Canopé, le Clemi, France Inter et Enjeux e-medias.
Chaque numéro dure deux minutes et part d'un cas concret pour expliquer les situations auxquelles les journalistes doivent faire face ou qui sont proposées aux lecteurs-auditeurs-téléspectateurs-internautes. Par exemple, voici pourquoi un accident sans victime près de chez moi prend parfois plus de place que vingt morts à l'autre bout du continent :
Ces épisodes animés en stop motion parlent aux jeunes, mais pas seulement. Ils seront également des outils essentiels aux enseignants, puisque l'éducation aux médias est désormais une de leurs missions. "Et ce n'est pas toujours facile pour eux d'avoir la bonne réponse sur le fonctionnement des médias. Cette série constitue pour eux une vraie boîte à outils indispensable au ton décalé", indique Mathieu Jeandron, le directeur du numérique au ministère de l'Education national. En effet, le ton est souvent drôle, jamais donneur de leçon. Parce que, ainsi que conclut l'un des réalisateurs, Mathieu Decarli, "la pédagogie n'est pas forcément pénible".
18:11 Publié dans ACTUSe-Vidéos, Eclairage, Journal, Journaliste, Réseaux sociaux, Société, Télévision, Vidéo | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : médias, vidéos, pédagogie | |
del.icio.us |
Imprimer |
|
Digg |
Facebook | |
25/10/2015
Le pitoyable contenu de l’Express sous la coupe de Patrick Drahi
En quelques mois l’hebdomadaire crée par Jean-Jacques Servan-Schreiber est devenu un journal insipide tandis que Christophe Barbier, éditorialiste et directeur de la rédaction, se conduit en avocat du MEDEF.
Semaine après semaine, il suffit de feuilleter l’hebdomadaire l’Express pour constater une dégradation permanente du contenu rédactionnel, depuis le rachat du titre par Patrick Drahi. Chaque semaine on y affiche un grand titre en couverture sur un seul sujet, lequel sujet est souvent mal pensé et mal écrit dans une rédaction que le nouveau patron veut faire fonctionner avec un minimum de journalistes.
C’est encore le cas cette semaine avec un sujet consacré à New Yorksur 23 pages. L’actualité politique et sociale en France a pratiquement disparu tandis que trois chroniqueurs réguliers défendent les intérêts du capital en publiant des textes généralement insipides. Les autres articles relèvent davantage du publi-reportage que d’un rédactionnel journalistique. Au point qu’une motion de défiance a été votée contre le propriétaire et le directeur de la rédaction.
Subsiste toutefois la tribune hebdomadaire de Jacques Attali.
Mais ce dernier écrit davantage pour lui-même que pour les lecteurs du titre sans quitter des yeux son nombril. Il est capable de nous expliquer cette semaine comment « l’imminence du désastre » planétaire est devant nous en cinq petit points. Et de nous dire aussi comment nous pouvons éviter ce même désastre à condition de suivre ses cinq recommandations : « 1/ Lancer en le finançant par les énormes capitaux dormants, un programme massif d’investissements publics.. . 2/ Décider de dépenser avant 2025 les 100 milliards de dollars nécessaires à la satisfaction des besoins en économies d’énergie des pays du sud. 3/ mettre en place des procédures de police et de stabilité militaire par l’alliance des cinq membres du Conseil de sécurité des nations Unies. 4/ Prendre l’initiative d’un vaste dialogue des civilisations et des religions …5/ Coordonner les principales banques centrales, pour que leurs actions massives donnent aux initiatives gouvernementales le temps d’avoir de l’effet ».
Chirstophe Barbier surnommé le « Barbier le servile »
Notons enfin que l’Express garde encore un directeur de la rédaction en la personne de l’éditorialiste Christophe Barbier. Contesté par sa rédaction, le touche à tout amoureux de théâtre et que certains ont surnommé « Barbier le servile » pour d’autres raisons, se montre effectivement de plus en plus servile envers l’homme dans la main duquel il mange désormais.
Ce qui ne l’empêche pas, au contraire, de se faire donneur de leçon en s’adressant à se lecteurs. En témoigne la lecture qu’il leur donne de l’accord sur les retraites complémentaires entre le MEDEF et certains syndicats.
Amputer la retraite de quiconque de fera pas du rab, même en chômage longue durée à plus de 62 ans est la principale nouveauté de cet accord. Sous la plume de Christophe Barbier, il n’y a plus que des avantages. Car grâce à cet accord, « le salarié qui aura cotisé assez longtemps pourra choisir un départ immédiat, mais avec une pension minorée, ou un départ différé d’un an, qui lui permettra d’en toucher l’intégralité. S’il prolonge encore son activité, sa retraite sera même améliorée. Bref, les partenaires sociaux viennent d’inventer, si l’on peut dire, « la quille gonflable ».
Qualifiant cet accord sur les retraite AGIRC et ARRCO de «gagnant-gagnant-gagnant» il nous dit aussi que « les caisses sont sauvées, les salariés récompensés et les entreprises assez peu ponctionnées». Sur sa lancée, il demande que l’on fasse de la Sécurité sociale « une voie lactée » et trace la route pour y parvenir en ces termes : « permettons à chacun de construire sa stratégie de retraite, de composer son assurance chômage et d’élaborer sa protection médicale à la carte ».
Il a de quoi être content Patrick Drahi, s’il prend le temps le lire l’Express. Pour ce qui est des lecteurs, on ne peut pas dire qu’ils en aient pour leur argent avec « Barbier le servile » devenu carpette !
19:43 Publié dans Actualités, Eclairage, Journal, Journaliste | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : express, barbier | |
del.icio.us |
Imprimer |
|
Digg |
Facebook | |
04/07/2015
Grèce : quand les médias privés font la propagande du oui au référendum
Des images bidonnées, des spots terrorisants, une répartition des temps de parole ubuesque... les télés privées plaident lourdement pour l'approbation du nouveau plan d'austérité. La contestation s'exprime sur le net.
« Il faudra penser à prendre en photo le bulletin Non en sortant de l'isoloir, pour bien montrer à nos chefs qu'on a laissé le “Oui" dans l'urne », ironisait en direct un animateur de la chaîne privée Skaï, il y a quelques jours. Que sous-entendait-il ? Que sa direction lui imposait son vote au référendum? Evidemment non, mais qu’en tout cas, sur sa chaîne, comme sur toutes les autres télés privées du pays, il n’existe ces jours-ci qu’une ligne éditoriale possible : le oui au référendum et à l’application des mesures d’austérité de la Troïka.
Depuis le 26 juin et l’annonce, par le premier ministre Alexis Tsipras, de la tenue d’un référendum sur un nouveau plan d’austérité, c'est peu dire que, sur Skaï comme chez ses concurrentes Antenna, Mega et les autres, le non et ses défenseurs n'ont pas droit de cité. « A grands coups d'émissions spéciales et de débats totalement orientés, c'est une propagande pro-oui que les six chaînes privées du pays déploient à longueur de journée », explique Marianna Karakoulaki, journaliste indépendante. Elle, comme nombre de journalistes et de citoyens, n'ont de cesse de dénoncer depuis plusieurs jours, sur les réseaux sociaux (surtout Twitter), cette désinformation assumée.
En face, les méthodes employées sont dignes des médias de républiques bananières. Pour illustrer un reportage sur la prétendue panique des citoyens dans les banques, la chaîne Mega n’hésite pas à utiliser des images vieilles de trois ans, tournées à l'étranger. Mis face à l'énormité de la chose par des internautes, Michael Laganis, l'un des auteurs du reportage, s'est excusé avec désinvolture : « Comme vous voudrez madame. Nous faisons tous des erreurs. Merci pour votre remarque. » Alors qu'elles devraient offrir une campagne équitable, comme elles y sont légalement obligées, les chaînes privés ont complètement banni le non de leurs programmes. On n'aura pu y voir quasiment aucune image des nombreuses manifestations qui, à Athènes ou à Thessalonique, ont conspué le texte de la Troïka.Un internaute a comptabilisé les temps d'antenne, sur les journées des 29 et 30 juin, sur cinq chaînes privées (Mega, Skaï, Antenna, Star et Alpha TV). Le résultat est tellement déséquilibré qu'il prête à rire. Au total, huit minutes sur l'ensemble des cinq canaux pour le non (cercle de gauche), contre quarante-sept minutes pour le oui (cercle de droite).

Pourquoi ? « Tous les propriétaires des chaînes privées en Grèce sont des hommes d'affaires qui possèdent des entreprises dans tous les secteurs, du bâtiment aux mines d'or, en passant par des compagnies maritimes, explique Nikos Smyrnaios, universitaire et spécialiste des médias grecs. Tous ont des intérêts à sauvegarder et ont beaucoup à perdre en cas de sortie de la zone euro. »
Une manière de faire chuter le gouvernement Tsipras
Depuis des semaines, le « Grexit » – une sortie de la Grèce de la zone euro et le retour à la drachme –, est agité comme une menace par la Troïka dans ses négociations avec Athènes pour imposer à la Grèce son plan d'austérité. Mais les magnats à la tête des chaînes privées voient aussi là une manière de faire chuter le gouvernement Tsipras – qui a promis de remettre sa démission en cas de victoire du oui. Tsipras est très hostile à leur égard, contrairement aux gouvernements précédents avec qui ils avaient l'habitude d'avancer main dans la main.
Dans ce marasme, la presse papier grecque ne sort pas du lot, bien au contraire. L'Espresso Star, un tabloïd appartenant au même propriétaire que la chaîne privée Star, s’est fait largement brocarder pour avoir publié la semaine dernière, à la une, une image archirebattue du séisme de 1999 en Turquie.
Hormis les titres pro-Syriza, il ne faut pas compter sur les autres journaux de la presse papier comme To Vima, Ta Nea (de droite) ou Protothema (populiste) pour pointer ces aberrations. Au final, seule la chaîne publique Ert, récemment rouverte par Syriza, respecte un réel pluralisme : 4 minutes 50 pour le oui, contre 4 minutes 37 pour le non.Pour échapper à cette propagande, il faut se tourner vers le Net. Sur Twitter, des citoyens réunis depuis plusieurs jours autour du hashtag #greekmediapropaganda répertorient et dénoncent quotidiennement la désinformation en marche. Un Tumblr sur le même thème a été créé. Mais ces citoyens, pas dupes, sont pour la plupart des jeunes. « Or, cette propagande vise essentiellement les personnes âgées ou isolées, qui ne s'informent qu'à travers la télévision », explique Marianna Kala.
Un sondage réalisé par un institut grec, Alco, donne le oui gagnant à 44,8% contre 43,5% pour le non pour le référendum de dimanche. Dans le même temps, Bloomberg donne à l'inverse le non gagnant à 43%, contre 42,5% pour le oui. Entre les deux, le taux d'indécis oscille entre 12 et 15 %. « L'influence qu'aura la propagande des chaînes privées sur les indécis, voilà la principale question pour le peuple grec aujourd'hui », conclut Marianna Karakoulaki.
Jean-Baptiste Roch, Télérama
12:59 Publié dans Actualités, Eclairage, Informations, Manipulation | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : grèce, médias, manipulation | |
del.icio.us |
Imprimer |
|
Digg |
Facebook | |
19/06/2015
LA MANIPULATION 2.0
Taper Ryan Holiday sur Google.fr, et le nombre d’occurrences est surréaliste : 93 500 000. Certes, il doit y avoir plusieurs Ryan Holiday. Mais pour simple comparaison, tapons François Hollande : 22 700 000. Bien sûr, vous ne connaissez pas Ryan Holiday. Moi aussi, j’ignorais cet homme à la notoriété planétaire, qui s’avère être à la ville l’actuel ou l’ancien directeur de la communication d’American Apparel. Il vient de produire un livre, Croyez-moi, je vous mens. Confessions d’un manipulateur des médias (Éditions Globe, 2015), dans lequel il narre son expertise en webmarketing, en un mot comment créer du buzz, du clic, de l’influence, du trafic, et au final beaucoup d’argent.
Le système viral fonctionne comme une pyramide de Ponzi, avec au cœur de ce dispositif principalement des blogs américains : Gawker, Business Insider, Politico, Huffington Post, Drudge Report, BuzzFeed, Reddit, BoeingBoeing, Laughing Squid, FFFFound, Videogum, Mediabistro, Slate.com, Curbed, TechCrunch, Mashable, Freakonomics, FiveThirtyEight, Nate Silver, TreeHugger – sans oublier en amont et en aval Youtube et Wikipédia, qui jouent un rôle plus structurel encore d’accréditeur –, la liste est plus longue encore et s’update régulièrement.
Ce cher jeune homme de 28 ans nous explique ainsi comment, à partir d’une information qui n’en est pas une, il crée une circulation et une diffusion exponentielles, se traduisant en espèces sonnantes et trébuchantes pour ces clients. Le jeu étant principalement de manipuler les blogs institutionnels ou les médias traditionnels en leur laissant croire qu’ils ont trouvé, grâce à leur investigation qualitative, la perle rare dans leurs pérégrinations numériques, alors qu’ils ne font que suivre le petit itinéraire concocté par le dircom adulescent.
Les tactiques sont vieilles comme le monde, simplement ajustées au monde digital : il s’agit d’organiser de fausses fuites, de rédiger de faux mails avec de fausses adresses, de créer des « sources » de toutes pièces, d’offrir des produits aux blogueurs pour acheter leur bienveillance, d’organiser son autopromotion via des commentaires inventés sur les sites, d’avoir l’art de la titraille, de polémiquer inutilement, d’user abusivement de l’image, de manier le chaud et le froid (en soutenant de façon ostentatoire les causes perdues d’avance et en couvrant les faits et gestes de la haute société), de faire croire à une rumeur pour rendre l’information plus attractive, d’être très rapide – partant les modérateurs des sites ne font jamais d’erreurs mais des « mises à jour », cela permet d’écrire du faux, en expliquant que la vérification est en cours de route, etc.
Oubliez la déontologie, l’éthique, cela n’a aucun sens et n’est nullement l’enjeu. L’enjeu, c’est de générer du clic : nulle lecture, nulle compréhension de ce qui est écrit. Simplement du clic. La crédibilité ne fait pas le business model, clame Ryan Holiday ; il faut raconter aux lecteurs ce qu’ils veulent entendre. Cessez de « nourrir le monstre », dit le gaillard, qui s’est bien gavé, et qui malgré la nausée et l’apparence de la dénoncer, n’est pas près de lâcher l’affaire.
(1) - Cynthia Fleury (civilement Fleury-Perkins), née en 1974, enseigne la philosophie politique (en qualité de research fellow et associate professor) à l'American University of Paris, chercheur associé au Muséum national d’histoire naturelle, maître de conférences (vacataire) à l'Institut d'études politiques de Paris, psychanalyste et enseignante à l'École polytechnique.
Elle tient une tribune libre, hebdomadaire, dans L'Humanité depuis 2003. Auteur de nombreux articles, elle est fréquemment invitée sur les plateaux de télévisions pour parler de thèmes tels que la politique, la religion ou l'imagination.
16:42 Publié dans Actualités, Eclairage, Informations, Internet, Manipulation, Réseaux sociaux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cynthia fleury, manipulation 2.0, manipulation, digital | |
del.icio.us |
Imprimer |
|
Digg |
Facebook | |