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05/04/2011

Quand la propagande défigure le débat public

lybie0001.jpgHenri Maler, membre de l'association Action-Critique-médias (Acrimed), décrypte le traitement médiatique qui a été fait en France de l'entrée en guerre en Libye.

Quelles sont les premières observations recueillies par Acrimed sur le traitement médiatique de cette guerre en Libye ?

Henri Maler. Avant même que ne commencent les bombardements, on a assisté à une véritable exaltation guerrière. Dès le vote de la résolution de l'ONU, la plupart des sites des quotidiens et des hebdos, impatients, nous prévenaient : « Le compte à rebours a commencé. » Il n'est pas exagéré de dire que le petit monde des grands médias s'est félicité de la perspective des bombardements sur la Libye, semblant oublier qu'une guerre est avant tout. une guerre. Entre les journalistes qui bombent le torse et ceux qui, à défaut de revêtir leur treillis, se mettent à parler comme les militaires, rien ne nous est épargné. Une rhétorique va-t-en guerre soutenue par une fièvre chauvine sur le rôle de « la France ». Qui a « frappé la première », pouvait-on lire à la une de la plupart des quotidiens, le lendemain des premiers bombardements. Cocorico, c'est la guerre !

Une guerre présentée comme indispensable.

Henri Maler. Inévitable et indiscutable. Or, qu'on la soutienne ou la réprouve - que l'on pense que l'intervention militaire était nécessaire (pour empêcher les forces armées de Kadhafi d'écraser la révolte à Benghazi) ou au contraire que l'on devait et pouvait l'éviter -, on est en droit d'attendre des médias qu'ils ne soient pas le service après-vente du ministère de la Défense, reprenant la moindre de ses informations et le moindre de ses termes, sans aucune distance critique. C'est à peine si les principaux médias osent parler de « guerre », alors que des centaines de missiles ont été tirés dès les premiers jours. Ils évoquent, non des bombardements, mais des « frappes » : des frappes « ciblées », nouvel avatar des « frappes chirurgicales ». On nous montre, à grand renfort d'images fournies par l'armée elle-même, le haut degré de précision et de technologie de « nos » armes.

Pourtant, cette guère soulève au moins quelques questions. Quelle place a été accordée aux divergences ? Le pluralisme des avis et analyses sur cette intervention a-t-il été respecté ?

Henri Maler. Dans leur emballement, la plupart des médias ont « oublié » de commencer par poser ces questions. Et quand des questions partielles ont surgi, après l'euphorie des premiers jours (sur les dissensions, le commandement, les objectifs), les interrogations sur la nécessité et la légitimité de cette guerre qui ne dit pas son nom - présentée, au fond, comme une opération humanitaire, et non comme une intervention militaire - étaient devenues « hors sujet ». On nous a répété jusqu'à la nausée que cette opération était soutenue par la « communauté internationale ». Les gouvernements de la Chine, l'Inde, la Russie, l'Allemagne, le Brésil. ont fait part de leurs réserves ? Ce n'est pas un problème, puisqu'ils se sont abstenus ! D'autres se sont déclarés franchement hostiles. Qu'importe : la « communauté internationale » existera sans eux. Plutôt que d'informer sur leurs arguments et de tenter de les comprendre, avant de soutenir ou de réprouver leurs positions, on a traité tous les réfractaires par le mépris. Quand aux arguments de ceux qui, en France même, émettent des objections sur le fond ou s'opposent à cette guerre-là, ils ont été relégués, dans les meilleurs des cas, dans les « tribunes libres

Comment expliquer ce traitement médiatique ?

Henri Maler. On peut être tenté d'expliquer ce traitement par le poids des marchands d'armes dans le paysage médiatique français. Le cas du Figaro, propriété de Serge Dassault, qui fournit l'armée française (et qui a aussi vendu des avions à Kadhafi) est presque caricatural. Mais ce serait un raccourci. Ce qui domine, c'est le suivisme des grands médias à l'égard de la prétendue « communauté internationale », des institutions politiques et militaires, et de l'unanimisme des partis dominants en France même. Cette déférence institutionnelle se nourrit des croyances partagées, sinon par tous les journalistes, du moins par les chefferies éditoriales. Dès lors, la propagande menace de dévorer l'information et de défigurer le débat public

Henri Maler est coauteur de l'Opinion, ça se travaille. Les médias et les guerres justes : Kosovo, Afghanistan, Irak (avec Serge Halimi et Dominique Vidal, Agone, 2006). Voir aussi www.acrimed.org

13:47 Publié dans Eclairage, Entretien, Manipulation | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : libye, propagande, médias, manipulation | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | |

26/03/2011

Baromètre de la communication locale : de fortes attentes des français

Vu sur le site de Cap’Com :mairie1.JPG

"Les résultats de la seconde édition du Baromètre de la communication locale ont été rendus publics.

Réalisé par l’Institut CSA et l’agence Epiceum, en partenariat avec Cap’Com, le Baromètre 2011 conforte et précise les grandes tendances observées en 2009 : la situation tout à fait privilégiée de la communication territoriale dans le quotidien des Français (97 % lisent au moins un support de collectivités), des attentes toujours vives, boostées par la multiplication des canaux, des faiblesses récurrentes en termes de crédibilité.

Les moyens d’information privilégiés demeurent les publications des collectivités distribuées en boîte aux lettres et la télévision locale.

jourchien.gifPour s’informer sur l’actualité locale, 91 % des interviewés se déclarent en attente de supports papier, 72 % d’outils web, 35 % de supports sur mobile.

Si le maintien des publications territoriales sur papier apparaît encore comme une priorité pour les français, on observe une hausse des attentes complémentaires sur l’internet (sites web, e-letter), et un intérêt significatif pour les supports mobiles (SMS, applications Smartphone) nouvellement mesurés, positionnant ces derniers comme un segment porteur.

Le baromètre confirme que pour s’informer sur la vie locale via internet, les Français consultent davantage d’autres sites que ceux des collectivités. Cet écart, observé également au niveau des entreprises, dénote la difficulté des communicants à faire vivre les sites institutionnels face aux autres espaces du web (blogs, réseaux sociaux).

Pour les français, la presse des collectivités territoriale reste essentielle mais elle est appréhendée de plus en plus comme complémentaire à d’autres medias. Une situation qui annonce certainement une transformation progressive de la presse territoriale non sans importance lorsque l’on sait qu’elle représente le premier poste de dépense des budgets communication des collectivités locales.

Les associations sont les acteurs dont la communication inspire le plus confiance aux Français, notamment (pour 79 % des interviewés) en matière d’action sociale, confirmant le rôle important qu’elles tiennent aujourd’hui en France sur le plan social.

Les collectivités se placent en deuxième position avec en point fort leur communication en matière d’action sociale et de développement durable, crédible pour plus de 7 Français sur 10.

L’État est l’émetteur dont l’information suscite le moins la confiance, notamment en matière budgétaire et financière, alors qu’en matière sociale et de développement durable, il se rapproche tout juste de la moyenne.

Dans le quotidien des Français, la communication territoriale se présente sans conteste dans une situation privilégiée. Particulièrement lue, avec 97 % d’entre-eux lisant ou consultant un ou plusieurs supports émis par les collectivités, largement appréciée même si la modernité reste à prouver. Les français sont dans l’attente d’une communication plus abondante, boostée et non pas freinée, par la multiplication des canaux et des outils. Plus de 40 % des Français émettent le souhait de recevoir davantage d’informations de leur mairie."

16:21 Publié dans Informations, Journal | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : communication locale, baromètre | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | |

07/03/2011

LES JEUNES FONT L’HUMA !

humajeunes2.jpgInitiative unique en France et en Europe un grand journal national rédigé entièrement par une centaine de jeunes un week-end du mois de mars.

Ce sont eux qui ont ainsi réalisé entièrement le contenu du journal l’Humanité du 07 mars.

humajeunes.jpgIls ont déterminé ensemble les sujets traités, la hiérarchie de ce traitement, et écrits tous les articles y compris les brèves.

Cette collaboration n’est pas soudaine. Le journal l’Humanité est ainsi rédigé un jour par an par des jeunes correspondants volontaires sélectionnés pour la plupart à l’occasion de la fête du l’Humanité où informéé de cette initiative par des associations lycéennes comme « jetsdencre ».

humajeunes3.jpgLe résultat de ce pari offert à ces jeunes journalistes a été des plus prometteur. Les 28 pages de ce numéro où les faits de l'actualité sociale, politique, économique, culturelle, sportive sont d'une densité et d'une qualité remarquable.

Ces jeunes correspondants disposent également tous les jeudis d’une page de ce journal nommée « libre échange » où ils ont la liberté d’écrire. Certains de leur articles ou dessins sont également publiés sur le site web du journal.

Le journal créé par Jean Jaurès en s’ouvrant ainsi démontre sa capacité à jouer la carte de la jeunesse et du dynamisme.

 

 

19:25 Publié dans Blog, Informations, Journal | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : l'humanité, jeunes, correspondants | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | |

01/03/2011

Cyberrévolutions « L’élément déterminant, c’est l’existence d’un profond sentiment d’injustice sociale»

egypteplace.jpgPar Farhad Khosrokhavar, sociologue, directeur d’études à l’EHESS.

Entretien

Les mobilisations populaires dans 
les pays arabes ont-elles été déclenchées par les blogueurs et les usagers des réseaux sociaux, comme on peut le lire 
ou l’entendre dans certains médias ?

Farhad Khosrokhavar. Le mot « déclencher » est très ambigu. Il y a énormément de pays dans le monde où des blogueurs protestent et où rien ne se passe. Donc, dire que la cause serait dans les nouvelles technologies de la communication, c’est aller un peu vite en besogne. Pour que de tels mouvements se déclenchent, il faut d’abord qu’il y ait des problèmes sociaux et que les acteurs sociaux aient le sentiment que le régime ne répond pas de manière satisfaisante à leurs revendications. En Tunisie, par exemple, tout a commencé avec l’histoire de ce jeune homme, diplômé de l’université, qui ne trouvait pas de travail et s’adonnait à de la vente ambulante pour vivre. Arrêté par la police, sa marchandise confisquée, il s’est immolé par le feu, en guise de protestation. C’est cet événement à forte charge symbolique qui est à l’origine des événements en Tunisie. Que l’influence des blogueurs, surtout de Facebook, pour ce qui est de l’Égypte ou 
de la Libye, soit essentielle, personne ne le 
nie. Mais ce ne sont pas les instruments de communication qui créent l’événement. À une époque, on disait que la presse était à l’origine des mouvements sociaux de contestation. Or, la presse peut amplifier, donner l’occasion de certains liens entre différents pans de la société civile. Mais ni la presse ni les nouveaux moyens de communication ne créent les événements sociaux. En Tunisie, il y avait des facteurs structurels : une grande disparité entre des régions côtières à l’économie plutôt florissante et les régions de l’intérieur ; l’apparition d’une nouvelle classe moyenne qui, mentalement, se reconnaît bien comme appartenant aux classes moyennes, mais qui, socialement, est plus proche de la classe ouvrière, subissant de plein fouet chômage et précarité. Donc, l’élément déterminant, c’est l’existence d’un profond sentiment d’injustice sociale.

La focalisation de certains commentateurs occidentaux sur le rôle de ces nouveaux médias 
n’a-t-elle pas aussi pour effet, plus ou moins 
voulu, d’éclipser la dimension sociale (revendication d’égalité, de justice sociale, droit à un travail…) de ces révolutions ?

Farhad Khosrokhavar. Je ne pense pas que ce soit volontaire. Je dirais plutôt qu’il y a une sorte de frivolité des médias. Ils sont toujours séduits par ce qui est nouveau. Or, je le répète, les gens ne se mobilisent pas simplement parce qu’on leur envoie des messages sur Internet. L’élément déterminant, c’est la présence de revendications fortes dans la population, du fait des problèmes sociaux endurés. Ce qui est vrai, c’est que ces nouveaux moyens de communication facilitent les relations entre les gens d’une région à l’autre, d’une ville à l’autre, d’un quartier à l’autre… Des mouvements spontanés se font jour, dans des endroits où le pouvoir ne s’y attend pas. Par exemple, en Iran, le « mouvement vert » a été très aidé par Internet : par cet outil, les gens pouvaient se mobiliser à l’abri de l’espionnage du pouvoir. Ou du moins, ils pouvaient prendre de court le pouvoir. Quand celui-ci a compris ce qui se passait, qu’a-t-il fait ? Il a ralenti le débit de l’Internet, coupé les communications, le réseau de téléphonie mobile, etc. En Libye, le régime a recours aux mêmes méthodes. Mais malgré cela, on voit bien que les mouvements continuent d’exister. C’est donc bien qu’ils ont un soubassement social. Ce n’est pas une question de moyens de communication.

La spontanéité dont vous parliez a-t-elle des contreparties au niveau des perspectives politiques ? N’est-elle pas aussi une faiblesse ?

Farhad Khosrokhavar. Ce qui fait la force de ces mouvements fait aussi leur faiblesse. Leur force, c’est de ne pas avoir de structures, de hiérarchie, de cadre idéologique arrêté… Il s’agit bien là d’atouts. Car si les mouvements étaient, au contraire, structurés, ils ne pourraient tenir face à des pouvoirs souvent dictatoriaux, despotiques, comme en Libye, en Égypte ou d’autres sociétés de la région. Ils auraient été réprimés avant même de se développer. Or, aujourd’hui, on voit bien que lorsque le mouvement se lance, le pouvoir se trouve démuni, car il ne sait pas qui réprimer. Mais c’est évident que, par la suite, quand se pose la question du passage au politique, ces mêmes atouts deviennent des manques. Ce qui se passe actuellement en 
Tunisie ou en Égypte l’illustre bien. Reste que la forme de ces mouvements est déterminée par le contexte : des pouvoirs despotiques. Et il faut rappeler ici qu’une grande partie de ceux-ci ont bénéficié de la complaisance, si ce n’est plus, des gouvernements occidentaux. Le régime de Moubarak, en Égypte, arrangeait beaucoup les États-Unis et l’Europe. Parce que cela leur permettait de s’entendre sur les grands enjeux stratégiques, notamment par rapport à Israël, dans le dos du peuple égyptien. De même pour la Libye de Kadhafi, avec son pétrole et les grands marchés que cela offrait à l’Occident. On pourrait poursuivre la liste des exemples de cette complicité de fait.

Entretien réalisé par 
Laurent Etre, pour l'Humanité

19:09 Publié dans Blog, Web | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : réseaux sociaux, révolutions | |  del.icio.us |  Imprimer | | Digg! Digg |  Facebook | |